Sur question préjudicielle de la Cour constitutionnelle belge (arrêt n° 43/2018), la Cour de Justice a été amenée à se prononcer sur la légalité de l’exclusion de la nécessité de soumettre les services juridiques d’avocats et d’arbitrage à des procédures de passation de marchés publics. Cette exclusion est prévue par la loi relative aux marchés publics du 17 juin 2016 (article 28, §1er, 3° et 4°) transposant la directive 2014/24 du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics.
La Cour a tout d’abord estimé qu’en conformité avec le principe de subsidiarité, la réglementation européenne a légalement laissé aux législateurs nationaux le choix de déterminer si ces services juridiques devaient ou non être soumis aux règles et procédures de passation des marchés publics.
Les services d’arbitrage et de conciliation
Plus précisément, la Cour a jugé qu’en ce qui concerne les services d’arbitrage et de conciliation, les organismes ou personnes fournissant des services d’arbitrage et de conciliation sont sélectionnés d’une manière qui ne peut être soumise à des règles de passation de marchés publics, dans la mesure où ils doivent toujours être acceptés par toutes les parties et sont désignés d’un commun accord par celles-ci. Un organisme public qui lancerait une procédure de passation de marchés publics pour un service d’arbitrage ou de conciliation ne saurait, dès lors, imposer à l’autre partie l’adjudicataire de ce marché en tant qu’arbitre ou conciliateur commun.
Les services d’avocats
Ensuite, concernant les services fournis par des avocats, la Cour estime que le législateur de l’Union a pris en compte le fait que de tels services juridiques sont habituellement fournis par des personnes qui sont désignés ou sélectionnés d’une manière qui ne peut, ici non plus, être soumise à des règles de passation des marchés publics. Sont cependant uniquement exclus (i) la représentation légale de son client dans le cadre d’une procédure devant une instance internationale d’arbitrage ou de conciliation, devant les juridictions ou les autorités publiques d’un État membre ou d’un pays tiers ainsi que devant les juridictions ou institutions internationales, et (ii) le conseil juridique fourni dans le cadre de la préparation ou de l’éventualité d’une telle procédure.
La Cour a précisé à cet égard que « de telles prestations de services fournies par un avocat ne se conçoivent que dans le cadre d’une relation intuitu personae entre l’avocat et son client, marquée par la confidentialité la plus stricte. Or, d’une part, une telle relation intuitu personae entre l’avocat et son client, caractérisée par le libre choix de son défenseur et le rapport de confiance qui unit le client à son avocat, rend difficile la description objective de la qualité attendue des services à fournir. D’autre part, la confidentialité de la relation entre l’avocat et son client, dont l’objet consiste, (…) tant à sauvegarder le plein exercice des droits de la défense des justiciables qu’à protéger l’exigence selon laquelle tout justiciable doit avoir la possibilité de s’adresser en toute liberté à son avocat (…) pourrait être menacée par l’obligation, pour le pouvoir adjudicateur, de préciser les conditions d’attribution d’un tel marché ainsi que la publicité qui doit être donnée à de telles conditions ».
La Cour en conclut que l’exclusion belge des services juridiques d’avocats et d’arbitrage des procédures de passation de marchés publics ne méconnait pas le principe d’égalité de traitement.
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