ACCORD JUB («UPC») | QUELLES COMPÉTENCES POUR LA JURIDICTION UNIFIÉE DU BREVET?
Partie 2 | COMPÉTENCE «INTERNE» (ENTRE PAYS MEMBRES DE L’ACCORD JUB)
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L’introduction du brevet européen à effet unitaire s’accompagne de l’institution d’une juridiction unifiée exclusivement compétente pour connaître de certaines actions relatives à ce nouveau type de brevet et à quelques autres titres similaires. L’entrée en vigueur prochaine de l’Accord instituant la Juridiction Unifiée du Brevet («JUB» ; «Unified Patent Court», «UPC») est l’occasion d’aborder ici, mais sans entrer dans tous les détails, les principales règles qui détermineront les compétences entre les pays membres de cet accord («Etats JUB») (concernant les autres pays, voir la partie 3).
Rappelons que la structure de la JUB présente deux niveaux :
- une cour d’appel unique établie à Luxembourg et,
- un tribunal de première instance.
Le tribunal de première instance comprend :
- une division centrale organisée en trois sections, situées à Paris, à Munich et probablement à Milan (celle-ci au lieu de Londres, comme suite au Brexit),
- des divisions régionales (communes à plusieurs États JUB ; une seule jusqu’à présent) et
- des divisions locales (propres à un État JUB en particulier ; certains Etats JUB n’en ont pas, tels le Grand-Duché du Luxembourg, Malte et la Bulgarie).
Rappelons aussi au préalable que la compétence matérielle de la JUB est limitée aux actions énumérées à l’article 32 de l’Accord JUB (essentiellement les actions en contrefaçon, en déclaration de non-contrefaçon, en nullité, recours contre les décisions de l’OEB concernant l’effet unitaire).
Les actions non comprises dans cette compétence relèvent des tribunaux nationaux et du point de vue international selon les règles de compétence du règlement dit Bruxelles 1bis et de la Convention de Lugano (2007) (qui, pour mémoire et à ce jour, ne lie plus le Royaume-Uni).
Titres soumis à la juridiction de la JUB : rappelons aussi que la Juridiction Unifiée du Brevet (« JUB »), qualifiée de juridiction « commune » aux États JUB, est compétente pour connaître des litiges en matière de :
- brevets européens avec effet unitaire,
- brevets européens sans effet unitaire, sauf ceux qui, pendant la période transitoire, auront fait l’objet d’une déclaration de «opt-out»,
- demandes de brevets européens, sauf celles qui, pendant la période transitoire, auront fait l’objet d’une déclaration de «opt-out»,
- certificats complémentaires de protection délivrés pour des produits protégés par un brevet européen (« CCP »), sauf ceux qui, pendant la période transitoire, auront fait l’objet d’une déclaration de «opt-out».
Nous présentons très brièvement ci-après les règles qui s’appliquent dans le périmètre des Etats JUB pour déterminer la division compétente du tribunal de première instance de la JUB, ainsi que quelques conséquences procédurales lorsque plusieurs actions sont en jeu.
| RÉPARTITION DES LITIGES AU SEIN DE LA JUB
Les parties pourront, d’un commun accord, porter leurs litiges relevant de la compétence de la JUB devant n’importe quelle division, à l’exception toutefois des recours contre les décisions de l’OEB (enregistrement de l’effet unitaire), lesquels devront être portés devant la division centrale de la JUB.
À défaut d’accord des parties, les règles supplétives suivantes s’appliquent :
- les actions en contrefaçon peuvent être portées au choix du demandeur :
- soit devant la division locale ou régionale du lieu de la contrefaçon,
- soit devant la division locale ou régionale du domicile du défendeur, de son principal établissement ou, à défaut, d’un de ses établissements,
- soit devant la division centrale, si aucune division locale ne se trouve sur le territoire de l’État JUB concerné et que celui-ci ne participe pas à une division régionale (par exemple le Grand-Duché du Luxembourg).
- les demandes reconventionnelles en nullité introduites en réaction à une action en contrefaçon pourront donner lieu à trois scénarios possibles :
- soit la division statue elle-même sur l’action en contrefaçon et sur la demande reconventionnelle,
- soit la division renvoie la demande reconventionnelle devant la division centrale et statue sur l’action en contrefaçon ou sursoit à statuer sur celle-ci («bifurcation»),
- soit la division renvoie toute l’affaire devant la division centrale, moyennant l’accord de toutes les parties.
En cas de bifurcation, le Règlement de procédure prévoit que la division est obligée de surseoir à statuer lorsque la probabilité est grande que les revendications du brevet en cause soient déclarées nulles par la division centrale.
- les actions principales en nullité et en déclaration de non-contrefaçon relèvent de la compétence de la division centrale.
Toutefois, si une action en contrefaçon est déjà pendante entre les mêmes parties au sujet du même brevet devant une division locale ou régionale, ces actions ne peuvent être portées que devant la même division locale ou régionale. Les trois scénarios possibles décrits au point précédent sont envisageables, y compris la « bifurcation ».
Si une action en nullité est déjà pendante devant la division centrale, une action en contrefaçon peut être portée entre les mêmes parties au sujet du même brevet devant n’importe quelle division (locale, régionale ou centrale). Dans ce cas, si l’action en contrefaçon est portée devant une division locale ou régionale et si le défendeur introduit dans ce cadre une demande reconventionnelle en nullité du brevet, les trois scénarios possibles décrits au point précédent sont envisageables, y compris la « bifurcation ». Sauf accord des parties, la division centrale doit surseoir à statuer dans l’attente de la division saisie sur la suite de la procédure. Le Règlement de procédure prévoit par ailleurs que, pour décider de la suite de la procédure, la division saisie doit tenir compte de l’état d’avancement de l’action en nullité devant la division centrale.
Une action en déclaration de non-contrefaçon se verra suspendue si, dans les trois mois de son introduction devant la division centrale, une action en contrefaçon est engagée devant une division locale ou régionale.
- les actions « en réparation » relatives aux licences formées sur la base de l’article 8 du règlement (UE) n° 1257/2012 (« licences de droit ») relèvent de la compétence de la division locale ou régionale du domicile du défendeur, de son principal établissement ou d’un de ses établissements.
| RÈGLES PARTICULIÈRES
Une action ne peut être exercée devant la même division contre plusieurs défendeurs établis dans des Etats UPC différents que si ces défendeurs ont un lien commercial et si l’action porte sur la même contrefaçon alléguée.
Les situations de litispendance (plusieurs actions entre les mêmes parties au sujet du même brevet) seront évitées par une règle de préférence en faveur de la division saisie en premier lieu.
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Team – Propriété Intellectuelle | upc@simontbraun.eu
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Cet article ne constitue pas un avis ou un conseil juridique. Veuillez-vous adresser au conseil juridique de votre choix avant d’agir sur la base des informations contenues dans cet article.